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Le communautaire: les départs massifs d’employés

Les organismes de bienfaisance peinent à retenir leurs employés qui cherchent de meilleurs salaires et de conditions de travail.  


Par Camila Lewandowski 


Qu’est-ce qui ne devait être qu’un emploi temporaire pour acquérir de l’expérience dans le domaine de la psychologie, s’est finalement transformé en un projet de vie. William Delisle a senti le coup de foudre envers le Club Ami, dès sa première journée en tant qu’intervenant psychosocial il y a plus de dix ans.  


« Il y a avait tellement un bel accueil que je suis tombé dans le piège », dit Delisle avec un large sourire. Aujourd’hui, il est le directeur de l’organisme de soins alternatifs en santé mentale. 



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William Delisle est le directeur du Club Ami depuis quatre ans et a réussi pendant son mandat de créer un réseau stable d’intervenants psychosociaux. 


Par contre, la cote de rétention d’employés dans le milieu communautaire est très faible. Delisle est un cas isolé; peu de gens restent autant d’années au sein de la même organisation. En effet, plus de 71 pour cent des organismes œuvrant dans les soins de santé et d’assistance sociale éprouvent de la difficulté pour maintenir en poste leur personnel, selon un rapport de Statistique Canada


Delisle explique que pendant son parcours chez Club Ami, il a eu une vingtaine de collègues. « J’avais un an d’expérience et j’étais celui qui avait le plus d’ancienneté », il dit d’une voix incrédule. 


Cette instabilité nuisait au propre fonctionnement de l’organisme, dit Delisle, qui essaie d’avoir des employés qui restent à long terme au sein de l’organisation. Il explique que les intervenants psychosociaux, par le biais de conversations et activités artistiques, allègent les souffrances des bénéficiaires du Club Ami qui ont des diagnostiques variant de l’autisme à la schizophrénie. 


La rétention d’employés qualifiés est une complication récurrente dans le domaine communautaire. Effectivement, près du tiers du personnel œuvrant dans les organismes de bienfaisance quitte son poste pour obtenir un meilleur salaire et de meilleures conditions de travail, d’après l’enquête nationale du Comité sectoriel de main-d'œuvre de l’économie sociale et de l’action communautaire (CSMO-ESAC).  


Ces départs massifs nuisent au bon fonctionnement des associations caritatives. Tel a été le cas du Comité d’action des citoyennes et citoyens de Verdun (CACV) qui a vu quatre de ses employés démissionner presque à même temps en 2021. Cela a été un coup dur pour les Verdunois en termes d’accès au droit au logement, selon le coordinateur du CACV, Nicolas Lavaine. 


« Un seul employé a tenu bon le bateau pendant plusieurs mois », explique Lavaine qui n’exclut pas la possibilité que cela réarrive. 



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Nicolas Lavaine fait partie de la nouvelle cohorte d’employés qui combattent la crise du logement à Verdun. 


Cette croissante problématique concernant la rétention d’employés qualifiés est étroitement liée au manque de financement des organismes de bienfaisance, étant donné que l’écart salarial entre le secteur communautaire et le privé est très prononcé. 


Par exemple, un directeur en ressources humaines gagne, en moyenne, près de         74 000$ par an dans le secteur communautaire – selon l’enquête OBNL+ – tandis que ce chiffre s’élève à 100 000$ pour le secteur privé – selon Randstad


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Les organismes de bienfaisance peinent à offrir des salaires compétitifs. « On n’a pas toujours les moyens financiers qu’on aimerait avoir pour permettre à nos employés d’être rémunérés pour la hauteur de ce qu’ils apportent », explique le coordinateur du CACV. 

Les employés du domaine communautaire sont aussi épuisés avec un alourdissement des charges de travail, vu que de plus en plus de gens se tournent vers les organismes de bienfaisance. Cependant, le temps supplémentaire n’est pas rémunéré dans 88 pour cent des organismes sondés par OBNL +.  


Lavaine explique que les intervenants en droit au logement sont à bout de souffle avec des cas de plus en plus complexes. Un nombre grandissant de locataires fait face à l’éviction de leur logement dû aux « rénovictions » et à la gentrification du quartier. « Ça prend beaucoup plus de temps et beaucoup plus d’énergie aussi », il rajoute. 


Delisle et Lavaine ont tous deux noté que le manque de financement et de soutien du gouvernement empêche les organisations à but non lucratif d'offrir un service optimal à leurs membres. 


Avec le recul, le directeur du Club Ami a observé que les différentes branches de l’État québécois nuisent à l’épanouissement des organismes de bienfaisance. « Il y a une instabilité du réseau qui fait que les liens avec le communautaire sont plus difficiles », Delisle explique. 


« Il faut créer des liens », il rajoute en discutant à propos des diverses associations caritatives montréalaises, « Sinon, on est tout le monde chacun pour soi dans notre silo; ça ne marche pas ». 

 

Apprenez davantage sur les projets à long terme des organisations où œuvrent Delisle et Lavaine ici. 

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